La Fédération Protestante d’Haïti a ouvert, ce mardi 14 juin, sa 37ème Assemblée Générale dans un contexte plus que difficile. La rencontre réunissant des leaders protestants venus de tout le pays avait lieu à l’hôtel Karibe, dans la commune de Pétion-Ville, banlieue aisée de Port-au-Prince, et se déroulait en même temps en visioconférence, pour permettre la participation des partenaires internationaux empêchés de se rendre en Haïti par la violence des gangs. À cette occasion a été diffusé un message vidéo de François Clavairoly pour marquer le soutien de la Fédération protestante de France, et à travers elle de tout le protestantisme français, aux protestants haïtiens. La veille, le vice-président de la FPH, le pasteur Jean Kisomaire Duré, accompagné du trésorier, le pasteur Thony Bristhole, avait tenu une conférence de presse pour rappeler la mission et la vision de la FPH en mettant l’accent sur l’importance d’une unification des ressources chrétiennes de la communauté haïtienne. Le thème de cette 37ème Assemblée Générale étant centré sur l’unité, le vice-président de la Fédération Protestante d’Haïti avait rappelé que cette notion est la base même de la mise en place de la fédération et doit aujourd’hui, plus que jamais, servir de socle pour un redressement de la société haïtienne à travers les valeurs chrétiennes.
Signe de la violence de la crise que traverse la société haïtienne, le Premier ministre Ariel Henry lui-même, intervenant quelques jours plus tôt au 9ème Sommet des Amériques à Los Angeles, avait parlé du recul de la démocratie dans son pays, de la violence aveugle des gangs, de la fuite massive des jeunes et des cadres… « Mon pays fait face actuellement à une insécurité alimentée par des gangs armés qui violent, qui tuent et kidnappent des nationaux aussi bien que des étrangers », avait-il déclaré. « Nos institutions démocratiques se sont effondrées (…) L’instabilité liée à une insécurité insupportable rend illusoire toute velléité de construire un avenir durable, résilient et équitable ». Cette emprise de la criminalité contribue à empirer la désorganisation dont souffre le pays tout entier, en coupant des voies de communication, en provoquant des pénuries – d’essence, d’eau, d’électricité, de biens de première nécessité – et en empêchant l’action des organisations humanitaires. Durant le mois de mai, au moins 200 enlèvements ont été recensés en Haïti par l’ONU, notamment à Port-au-Prince. Au cours du seul week-end dernier, ce sont pas moins de 38 personnes qui ont été enlevées dans la capitale par un gang, alors qu’elles s’apprêtaient à voyager à bord de deux minibus vers le sud d’Haïti. Elles ont depuis été relâchées, sans que l’on sache si leur liberté avait donné lieu au versement d’une rançon. Depuis le 1er juin 2021, les autorités ont perdu le contrôle du seul accès routier qui relie Port-au-Prince à la moitié sud du pays car, sur l’espace de deux kilomètres, la route nationale est totalement sous la maîtrise de bandes armées. C’est sur cet axe, à la sortie ouest de la capitale haïtienne, que l’enlèvement des 38 personnes s’était produit.
« Personne ne peut se dire à l’abri »
Depuis longtemps, ce sont les Églises qui tentent de pallier les carences de l’État en matière d’action sociale, d’éducation, de protection de l’environnement : autant d’actions cruciales pour Haïti où la profonde crise que traverse le pays frappe d’autant plus durement les plus fragiles. Et si Haïti est considérée comme « zone rouge » par le ministère français des Affaires étrangères, ce qui y limite les voyages aux seuls cas de nécessité absolue, c’est en soutenant ces institutions liées aux Églises qu’il est possible d’aider malgré tout. Pour marquer ce soutien, les membres de la Plateforme Haïti, mise en place par la Fédération protestante de France et coordonnée par le Défap, ont rédigé un appel à la prière destiné aux paroisses protestantes de France, à l’occasion de la réunion de la FPH. Après une brève présentation du pays, cet appel souligne que « depuis 2018, la situation socio-économique est fortement dégradée avec l’accroissement de la violence et de l’instabilité. L’assassinat du président de la République Jovenel Moise a fragilisé encore plus un pays souffrant déjà d’une profonde crise sociale et économique. Haïti s’enfonce dans la précarité, l’insécurité en raison de l’impuissance du gouvernement et du monde politique à pouvoir s’organiser afin de sortir le pays de la crise et d’une communauté internationale incapable d’accompagner le pays même dans les besoins primaires. »
L’insécurité est aujourd’hui telle que personne ne peut se dire à l’abri. Les témoignages qui nous parviennent de nos frères et sœurs sur place, encore largement impliqués dans la recherche d’une sortie de crise tout en subissant les effets de la situation sur la population, nous parlent de violences partout dans le pays, de difficultés d’accès aux biens de première nécessité et tout cela dans un pays lourdement touché par des catastrophes naturelles récurrentes.
« Les relations entre les protestantismes haïtien et français se sont formalisées à partir des années 80, suite au nouvel élan pris par la société civile haïtienne à la fin de l’ère Duvalier. Depuis, elles se sont traduites par divers soutiens fraternels, que ce soit dans les domaines politiques, financiers ou opérationnels. En France, la plateforme Haïti de la Fédération protestante de France a été présente aux côtés des Églises, institutions protestantes et de la population haïtienne. Elle rassemble les acteurs du protestantisme français qui sont en lien avec le protestantisme haïtien. La Fédération protestante d’Haïti rassemble environs 120 Églises, œuvres et missions présentes sur l’ensemble du territoire national, ainsi que la Fédération des écoles protestantes en Haïti qui assure la coordination entre les 3 000 écoles protestantes visant à la promotion d’une éducation de qualité. »
Le Défap et la Plateforme Haïti
La Plateforme Haïti de la Fédération Protestante de France est actuellement présidée par le pasteur Rodrigue Valentin, de l’Église du Nazaréen, et sa coordination administrative est assurée par le Défap.
La Plateforme rassemble les acteurs suivants :
• Le Service protestant de mission – Défap